La Palanca n° 1
       
Editò      
 
Qu’ei dab plan de gòi que començam aquera annada 1999 dab l’arribada d’ua associacion de qui hèva hrèita dempuish dias.
Daubuns que l’an páur avant qu’existesca, numerós son los de qui la desiran, los autes enfin ne saben pas brica çò qui ei.
Los estatuts qu’at disen l’associacion Nosauts de Bigòrra qu’a coma vocacion la coordinacion, l’armonisacion e la normalisacion de tots trabalhs quui sian ligats a la cultura occitana, mes raí. Nos parlem pas mès d’ua construccion juridica mes meslèu de las personas.
Los membres, los sòcis, aquestes que comptan. Qui èm ? Hemnas e òmes de tot escantilh, tots diferents los uns deus autes dab la madeisha hame de víver dens lo sué desvelopament. Las causas qui nos assolidarisan que son sentidas, a còps ditas, l’importent que son la legitimitat de la lenga e de la cultura istoricas d’un país gran. Qu’èm la mescla de duas culturas. Qu’èm tanben òmes de uei.
Qu’ei parlat mes haut de trabalhs. La realitat ei que ns’avem a her conéisher a noste. Alavetz que s’i cau atelar coma s’èram estrangèrs. Lo monde de qui s’atraçan ací qu’at saben : que ns’i podem amuishar la cara.
Qu’at avetz comprès aqueth aher que tòca a tot lo monde alavetz que vos atenem e a benlèu.
F. Bernissan
 
En començar l’annada 99, de qui vos esperi la mes favorabla possible, perseguir lo combat entà har vàler las nostas arradics, segurs qui èm que no cau pas attender uei lo sauvament de çò qui aimam ensus tot deus qui ns’an mancat destrusir ièr.
Entà continuar plegar’se a la nosta epòca per ua dinamica linguistica e culturau capable de sedusir las generacions navèras qui au lor torn e porteràn lenh lo noste anar vielh reviscolat. La Palanca pòt estar lo ligam enter duas vistas de qui an de comunicar entà fecondar’s. Arreparar las errors passadas de un cert eleit intellectuau de qui pensava poder sauvar las nostas particularitats arren que en negrejant papèr : de bon har, òc, alabetz que la perpetuacion de la lengua viva èra assegurada…
Nosauts de Bigòrra deu estar lo lòc d’encontre on las barrèras s’aubreishen a tots los qui volèn obrar entà la causa comuna quau que sie la loa plaça sociau, lo nivèu culturau. Pensam que l’occitan n’a pas a reprodusir l’ipocrisia de qui ns’an après : cada un a besonh deus auts.
Que la modesta Palanca de Nosauts de Bigòrra sie la via de qui s’avem a servir per ahortir los nostes moviments esparricats e amuchar nosta volentat de susvíver.
Miquèu de Camabracq
       
Faut-il ratifier la charte des langues régionales et minoritaires ?
 
Le gouvernement a annoncé son intention de ratifier la charte européenne des langues régionales et minoritaires dès le début de l’année 1999. Malgré l’avis négatif du Conseil d’Etat, des juristes tels que Guy Carcassonne ou Bernard Poigant, auteur du rapport « Langues et cultures régionales », estiment que la France peut, en conformité avec sa constitution, accepter plus que les trente-cinq alinéas minimum exigés pour la ratification. Et de surcroît, la signature serait accompagnée d’une déclaration interprétative pour rappeler que la notion de groupe évoquée par la charte « renvoie aux individus qui le composent et ne peut en aucun cas former une entité qui en serait distincte, titulaire de droits qui lui seraient propres ». Or, même avec cette ratification a minima, il n’empêche que l’esprit de la charte est clair et, nous semble-t-il, en contradiction avec la tradition et les valeurs républicaines hautement proclamées qui font l’égalité des droits un principe intangible. Le communautarisme fut-il hérité, n’est pas dans notre culture politique et démocratique. Or, le préambule affirme comme un « droit imprescriptible « le « droit de pratiquer une langue régionale ou minoritaire dans la vie privée ou publique ». Au-delà, il s’agirait même d’établir « le respect de l’aire géographique de chaque langue minoritaire, en faisant en sorte que les décisions administratives existant ou nouvelles ne constituent pas un obstacle à la promotion de cette langue régionale ou minoritaire ». Et allant encore plus loin, la charte envisage pour les agents publics pratiquants une de ces langues une certaine priorité pour l’affectation dans les territoires où elle est parlée. Le principe d’égalité sur le territoire national laisserait-il place à une sorte de « préférence régionale » qui enfermerait chacun dans son « pays », au sens restrictif du terme et dans une communauté aujourd’hui mythique, tout en mettant en cause la République dans ses pratiques les plus quotidiennes ?

Système bilingue
Que la charte réponde à des situations particulières en Europe, c’est l’évidence, bien que l’on puisse s’interroger sur nombre de dérives qui amènent certains à penser que l’on ne peut vivre « qu’entre soi », dans le cadre de communautés constituées par des natifs porteurs d’une langue circonscrite à un territoire. Si ces langues peuvent être pratiquées dans « la vie publique », cela ne suppose-t-il pas, comme le prévoit la charte avec, il est vrai quelque prudence, l’obligation d’un système bilingue pour l’administration en fonction des particularités de chaque territoire ?

Réserves et promotion
Sous prétexte que, par le passé, la culture portée par les langues aujourd’hui régionales fut méprisée et niée par la monarchie de la République, faut-il aujourd’hui détruire ce qui nous unit ? Communiquer sur un territoire, le territoire national en ce qui nous concerne, suppose la pratique d’une même langue qui est en même temps porteuse d’une culture avec ses façons de sentir et ses concepts. La charte ne va-t-elle pas recréer des minorités linguistiques enfermées dans leurs particularismes locaux ? Car la langue régionale, véritable enrichissement culturel pour ceux qui maîtrisent parfaitement la langue nationale et une ou plusieurs langues étrangères, pourrait être un facteur d’appauvrissement pour ceux qui, pour des raisons idéologiques, se contenteraient de son usage dans « la vie privée et publique ».
La nation française n’est pas la simple addition des anciennes provinces françaises caractérisées par leurs usages, leur culture et, bien sûr, leur langues. La nation, elle, s’est forgée par de multiples brassages de région à région et par l’apport considérable en France depuis plus d’un siècle d’une immigration multiforme. Et c’est la langue nationale, condition du vouloir-vivre ensemble, qui lui donne son unité alors qu’un Français sur quatre a des ascendances étrangères pour peu que l’on remonte jusqu’à la génération des grands-parents.
Mais pour toutes ces raisons, si la Fédération des œuvres laïques des Hautes-Pyrénées émet les plus vives réserves quant à la ratification de cette charte, elle n’en est pas moins favorables à la promotion culturelle de ces langues régionales, partie prenante de notre patrimoine commun. Clause de style ? Pas du tout, puisque, en ce début 1999, Lou Peyroutou, groupe de danses et de musiques traditionnelles de la FOL, édite un CD de danses bigourdanes accompagné d’un livret bilingue. Car découvrir ou s’approprier les racines d’une région ne signifie pas rejeter le présent en essayant de recréer ce qui n’est plus. Sauf si, par-dessus les nations européennes, il s’agit de surimposer une Europe des régions évoquée ici et là.
La Fédération des œuvres laïques de Hautes-Pyrénées.

       
Réflexion de Nosauts de Bigòrra à la Fédération des Oeuvres Laïques sur la Charte Européenne des Langues Minoritaires
 
Notre contribution au débat lancé par la FOL ne sera pas polémiste, nous constatons le texte parfaitement argumenté pour faire part des inquiétudes de l’Enseignement Laïque dur une probables adaptation éducative générée par la signatures de cette Charte par la France.
Que le sujet soit abordé sous forme de débat constructif, limitant tout blocage parasite de part et d’autre, préjudiciable socialement, honore ses auteurs. A Nosauts de Bigòrra, association adhérente à l’Institut d’Etudes Occitane et très récemment revitalisée, nous sommes aussi partie prenante du dialogue constructif.
En préambule, nous constatons simplement que la simple folklorisation des langues et cultures régionales en France peut être un danger politique évident, déjà perceptible dans le Sud-Est où le FN se donne une couleur déjà souhaitée par Pétain durant ses années sombres…
Aussi évidemment nous ne pouvons nous satisfaire de cette « mise en conserve » de nos valeurs qui serait une seconde mort.
D’une façon banalement moderne, nous considérons que faire vivre notre langue, laisser évoluer nos cultures par le contact naturel entre elles est vital et salutaire pour tous.
Reste bien sûr la concrétisation de nos vœux que nous savons ne pouvoir réaliser pleinement sans l’assentiment des autres acteurs éducatifs et culturels : ici devrait se vérifier l’aptitude de notre peuple à résoudre ses apparents contradictions sans conflits stériles.
Pour reprendre votre inquiétude sur le possible clivage de groupes culturellement différents, cette réaction serait à craindre justement si le verrouillage des institutions le rendait inévitable.
Vous dites aussi que « la charte répond a des situations particulières en Europe » ; mais partout bientôt les cultures devront trouver le moyen de cohabiter : la mondialisation des échanges de connaissances est un fait. Plusieurs pays de l’Europe pratiquent d’ailleurs depuis toujours cet art sans perdre leur force nationale, et dans le monde ces situations sont légions.
Au jeu des langues impérialistes, on devrait autrement assister à la prédominance de l’anglais, vecteur des communications modernes. Cette langue à d’ailleurs été largement apprise dans nos établissements publics, et ceci sans le moindre a priori porté à nos langues natives.
Véritablement pas dupes sur le fond nous pensons que dans notre système centraliste, les langues privilégiées sont celles de ceux à qui elles doivent profiter…
Mais nous voilà dans une phase de construction Européenne, façon Maastricht, déjà avancée.
Le danger est de voir les occitanistes préférer une Europe naturellement tolérante sur les diversités culturelles à une nation frileuse, rempliée sur ses vieux principes.
Au chapitre « Réserves et Promotion » vous soulevez le douloureux problème des hussards noirs de la République. Cette servilité des fonctionnaires a été un drame culturel profond et aussi familial pour ce qui concerne l’incompréhension parents-enfants qui en a résultée. Mais juger le passé n’a rien de constructif.
Se rappeler que les enseignants justifiaient leur comportement répressif par l’appréhension de ne pouvoir faire contenir « deux langues dans la même tête » prêterait à sourire.
Aujourd’hui, l’inaptitude des Français à apprendre les langues est devenu l’objet des quolibets de nos voisins européens.
A Nosauts de Bigòrra, nous sommes prêts aussi à débattre des problèmes plus locaux afin de contribuer à maintenir et améliorer la qualité de vie qui doit demeurer notre préoccupation principale, par-delà nos divergences.